jeudi 28 août 2014

Le réveil


J’entends le cadran sonner et mon père qui grogne dans sa chambre : «bon encore une journée de marde qui commence. Osti que ch’tu écoeuré.» Je suis dans mon lit dans le confort de mes mottons de couvertures. Je me souviens cette nuit avoir crié après mon père pour qu’il vienne me replacer tout ça. Isch! Si vous l’aviez entendu pogner les nerfs…


Je me lève et je cours aux toilettes. J’ouvre la porte, mais elle est tout de suite bloquée par une grosse paire de cuisses qui réchauffent le trône.


-Papa dépêche-toi j’ai envie!
-Les nerfs ti-gars. Papa fait pipi.


Je pousse la porte…


-Hey je t’ai demandé d’attendre. Je n’ai pas fini.


À l’autre bout de l’appartement se réveillent mes deux p”tits frères. Ils ont la même idée que moi. À trois on cogne et on gosse dans la porte de la salle de bain. Mon père ouvre la porte et nous rappelle en nous criant poliment dans les oreilles qu’il faut attendre son tour.


-Wow! Si vous êtes trois à pousser dans la porte ça ne me fera pas pisser plus vite!


C’est enfin mon tour. Je fais ce que doit et passe à la cuisine pour un bol de céréales.


-P’tit gars! Quelles céréales tu veux? Les rondes, les carrées ou les autres?


Je fais semblant de penser sachant très bien que les carrées sont molles et que les autres me font penser à de la bouffe à chat.


-Je veux les rondes mélangées avec les carrées.


Je goûte…


-Eurk Papa! Les carrées sont molles. Je veux un autre bol.


Mes frères font le même manège que moi en ajoutant en prime un reversement magistral de lait. Un truck load de céréales carrées molles et de céréales rondes se retrouve sur le plancher. De toute beauté. La scène m’inspire un beau dessin. Je vais en parler à ma professeure. On aime ça faire des beaux dessins l'école.

Pendant tout ce temps, mon père s’imagine, comme à chaque matin, être capable d’écouter la madame qui parle à la radio. Après 10 minutes, les sons se mélangent et il finit par abandonner. Lorsqu’il ferme la radio en regardant le plafond, je vois dans ses yeux le découragement et l’espoir d’un avenir meilleur. Le pauvre, il semble nostalgique de l’époque où nous étions encore qu’un rêve.

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